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Quelqu'un a appelé ce minuscule roman “une saga lapidaire��, un oxymoron approprié, je trouve. J’ose même ajouter l’étiquette de bildungsroman, étant donné que l'histoire de Valdas Bataeff commence en 1913, lorsqu'il avait 15 ans, et va être suivie pendant presque 80 ans (jusqu'en 1991), à travers deux calendriers : l'un qui s'en meurt avec tout un monde et un amour (le calendrier julien), remplacé par un autre (le calendrier grégorien, celui “des pays civilisés��, d’après Lénine), qui essaie d'effacer la mémoire du premier.

Bien que ce roman ne soit parmi mes favoris de Makine, j'ai été impressionnée par son style télégraphique qui réussit quand même garder toute sa puissance évocatrice :

Leur vie s’abrita dans le temps de l’ancien calendrier, le nébuleux retard qu’avaient supprimé les hâtifs constructeurs de l’avenir radieux.

Taïa�� leur temps faisant une escale, entre deux calendriers. À l’orée d’une fugace éternité��

Valdas se rendait compte que le passé, même le plus pénible, se décantait déjà et révélait un reflet de douceur, la volonté résignée de ne plus provoquer un monstre tapi au fond de leur souvenirs.

Heureux de ne plus avoir rien à démontrer, il se sentait aux côtés de Taïa, au-delà de tous les calendriers.

Pourtant, il me semble que la concision nuit au développement des personnages, qui restent des ombres chinois sur un canevas historique assez rudimentaire, comme s’il s’agissait seulement de la possibilité d’un roman. Une esquisse adroite, derrière laquelle le tableau reste à jamais caché.

3,5 étoiles